Topologie des politiques sociales

Didier Tabuteau a publié dans la revue Droit Social (DALLOZ) une importante étude « réalisée dans le cadre des réflexions conduites par l’Institut Montparnasse ». La première partie a été publiée dans le N° 6 de juin 2012 ; la seconde partie a été publiée dans le N° 7/8 de juillet-août 2012 Point de vue Qui trop […]

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Didier Tabuteau a publié dans la revue Droit Social (DALLOZ) une importante étude « réalisée dans le cadre des réflexions conduites par l’Institut Montparnasse ». La première partie a été publiée dans le N° 6 de juin 2012 ; la seconde partie a été publiée dans le N° 7/8 de juillet-août 2012

Point de vue

Qui trop embrasse mal étreint ? La stratification des législations sociales, l’extension désordonnée du champ social, le scrupule excessif de réglementation, ont rendu le dispositif des politiques sociales opaque, si ce n’est hostile, à la compréhension de l’assuré social citoyen. Donc à son adhésion.

Les politiques d’Etat se sont décentralisées, diversifiées dans leur financement. Les prestations universalistes soumises à contestation idéologique, à différenciation et conditionnalité. Les acteurs publics doublés d’opérateurs privés qui, par délégation ou par concurrence réduisent le périmètre du service public stricto sensu. Les fondements, perdus de vue, ne font plus digue aux confusions solidarité/assistance/assurance. Etat et Sécurité sociale subissent des procès en illégitimité, inefficacité, laxisme, gaspillage.
Il est indispensable de rétablir le sens et la cohérence de la solidarité nationale. Il est nécessaire de clarifier les responsabilités, les légitimités, les finalités. Et de remettre l’ensemble en perspective de la justice sociale.

Jean-Michel LAXALT
Président de l’Institut Montparnasse

Note de lecture

Hybridation des politiques sociales

L’État a progressivement pris le leadership de la politique d’assurance-maladie, dévolue à l’origine aux partenaires sociaux dans le cadre de la démocratie sociale 8. Avec le revenu minimum d’insertion (RMI), l’action sociale de l’État a été confiée en gestion aux caisses d’allocations familiales puis transférée aux conseils généraux. Une prestation d’aide sociale comme l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) a été totalement individualisée et soumise partiellement à une condition de ressources, tout en étant exonérée de tout recours sur succession contrairement aux règles habituelles de l’aide sociale. La ligne de partage entre la solidarité et l’assurance, qui avait été promue dans les années 1980 pour distinguer les différents types d’intervention, a été impuissante à redonner une véritable lisibilité à la multiplicité des interventions publiques. De plus la doctrine de l’« activation des dépenses sociales » est venue donner une base théorique à la mise sous « condition d’action » de nombreuses prestations (revenu minimum, indemnisation du chômage…).

Cette « hybridation » des politiques sociales, au regard des critères traditionnels de classement retenus par les sciences juridiques, politiques ou économiques, n’est pas sans conséquence sur le débat public. En complexifiant les fondements et les modes d’intervention de l’État-providence, ces évolutions ont accentué les suspicions et les incompréhensions qui accompagnent inéluctablement les politiques sociales.

La restructuration des politiques sociales autour de trois pôles canoniques

Un deuxième axe devrait conduire à s’interroger sur la restructuration des politiques sociales autour de trois pôles correspondant aux logiques dominantes de leurs interventions : un pôle de la solidarité économique, un pôle de la solidarité partagée et un pôle de la solidarité citoyenne

Le premier serait constitué des dispositifs reposant sur le principe du redistributivité. Il permettrait de réunir, et sans doute d’intégrer, les politiques déployées en matière de lutte contre l’exclusion, de logement, de handicap, et de perte d’autonomie des personnes âgées et la politique familiale. La question du rapprochement de la CNSA et de la branche famille de la sécurité sociale mériterait, dans cette optique, d’être posée.

Un deuxième pôle aurait vocation à rapprocher les politiques fondées sur le principe de proportionnalité. Les partenaires sociaux y occuperaient une place de premier plan et la convention pourrait en être l’instrument de droit commun. Cette protection sociale conventionnelle pourrait ainsi organiser les régimes de retraite, d’invalidité, de prévoyance complémentaire, d’indemnisation du chômage, des accidents du travail et des maladies professionnelles et de versement des indemnités journalières. Les organismes de protection complémentaire y joueraient un rôle important en qualité de gestionnaires d’un deuxième étage obligatoire de protection ou de dispositifs facultatifs régulés par les pouvoirs publics.

Enfin un dernier pôle consacré aux solidarités citoyennes fondées sur le principe d’universalité conduirait à développer une approche résolument universaliste en matière de santé et d’éducation. Sur ce pôle, l’État serait investi d’une compétence prééminente. Les législations générales, et souvent récentes, d’indemnisation des nouveaux risques (environnement, climat, iatrogénie, délinquance, …), qui sont vraisemblablement appelées à se développer, pourraient être rapprochées, et sans doute rationalisées, au regard en particulier des mécanismes d’indemnisation relevant des deux autres pôles.

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