Les tiers-lieux, facteur de la transition sociétale des territoires

Les tiers-lieux, facteur de la transition sociétale des territoires Le 7 décembre 2023, l’Institut Montparnasse organisait une rencontre autour des tiers lieux du territoire breton, à l’Université de Rennes 2. Historiquement, le mouvement mutualiste est né pour apporter une réponse collective aux épreuves de la vie. Les mutuelles constituaient ainsi des communautés d’entraide dans les […]

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Les tiers-lieux, facteur de la transition sociétale des territoires

Le 7 décembre 2023, l’Institut Montparnasse organisait une rencontre autour des tiers lieux du territoire breton,
à l’Université de Rennes 2.

Historiquement, le mouvement mutualiste est né pour apporter une réponse collective aux épreuves de la vie. Les mutuelles constituaient ainsi des communautés d’entraide dans les champs de la santé et de la prévoyance, assurant les risques financiers et développant une offre de soins à tarif raisonné dans les territoires. Ce maillage territorial s’accompagnait d’un engagement fort des militants
mutualistes, en particulier dans le champ de la prévention et de l’éducation à la santé. La législation européenne est venue mettre en concurrence les assurances et les mutuelles, obligeant ces dernières à s’associer voire à fusionner pour répondre au double objectif d’attractivité des cotisations et de solvabilité. 

Si elles étaient plus de 1500 en début des années 2000, on en recense 369 en 2020. Leur nombre a été divisé par 5 ! Ces bouleversements structurels ont eu pour effet de fragiliser le lien de terrain avec les adhérents. La distanciation entre la base de militants et l’administration des mutuelles s’est accompagnée d’un essoufflement des dynamiques militantes dans les territoires. D’un autre côté, les tiers-lieux occupent désormais un vide laissé par les mouvements d’éducation populaire. Au cœur des territoires, les tiers lieux développent l’économie de demain, plus écologique, sociale et solidaire. Ruralité, développement local, développement économique, solidarités et lien social, santé et prévention, culture, numérique… les tiers lieux sont devenus des lieux incontournables de partage et d’échange. Or, un tiers lieu ne fonctionne pas s’il n’y a pas des citoyens engagés, des envies de partage. C’est un signe de vitalité de ces territoires.

Qui sont-ils ? A quelles transitions contribuent-ils ? Quels sont leurs rapports aux citoyens et au territoire ?

Pour répondre à ces questions, Pascal Glémain et Gerard Krauss ont présenté les travaux de l’ANR Peri#work, qui étudient ces lieux de sociabilité.

Des tiers-lieux ont également témoigné (ESS Cargo représenté par Marie Bauduin, Comme un établi représenté par Edvin Bernardin) ainsi que des acteurs qui travaillent au développement de la dynamique tiers lieux (Arnaud Bonnet, directeur de Bretagne Tiers Lieux et chargé d’affaires à France Tiers Lieux, Léa Gelb, en charge de l’animation territoriale pour la Coopérative IDEAL).

De ces riches échanges, nous retiendrons trois axes :

1. De par leur ancrage et leur proximité, les tiers lieux ont la capacité d’engager les citoyens localement. Leur ADN les pousse à aller vers les publics éloignés pour favoriser leur émancipation citoyenne. Chantiers apprenants, ateliers participatifs, réseaux d’échanges et d’entraide… ces initiatives en matière d’apprentissage par le faire ensemble donnent un nouveau souffle aux pratiques d’éducation populaire.

2. Les Tiers Lieux, par leur diversité, ont la capacité à produire du rêve social et écologique. Le foncier permet une sociabilisation en dehors de la sphère personnelle familiale et de la sphère professionnelle. C’est bien la mise à disposition d’un lieu pour tous de manière inconditionnelle (ouvert à toutes et tous) qui favorise les rencontres et l’émergence des projets. Les Tiers Lieux renouent ainsi avec les dynamiques collectives, en recréant du lien entre des initiatives locales ou associatives qui avaient perduré de manière éparse.

3. Si “faire tiers lieu” implique d’avoir un projet commun, cela nécessite dans la démarche de faire vivre une coopération communautaire, et non complémentaire. L’enjeu est de taille pour les collectivités territoriales, qui doivent accepter d’adopter une posture de facilitatrice et non pas de délégant. Ainsi, les tiers lieux sont des terrains de partenariats au service du territoire et de ses habitants. Ils favorisent un mouvement qui implique des acteurs privés, associatifs, mais aussi des élus, de l’État, et bien sûr des citoyens qui font vivre ces lieux créateurs de lien social, autour d’outils innovants comme les SCIC ou PTCE.

La démarche tiers lieux est particulièrement inspirante pour le mouvement mutualiste parce qu’elle est la démonstration de la puissance des territoires.

En effet, c’est le sentiment d’appartenance territoriale qui crée des espaces communautaires adaptés à la société moderne, diversifiés et insérés de façons diverses dans la société globale. Les mouvements sociaux peuvent ainsi émerger sur la base d’actions issues de problématiques locales.

Les tiers lieux naissent de la conjonction de deux facteurs : une initiative citoyenne et une opportunité foncière. Il s’agit de lieux d’expérimentations basés sur une éthique humaine et écologique, ils accueillent des publics et des activités mixtes (économiques et d’utilité sociale) et favorisent les échanges de bonnes pratiques et l’empowerment, sur des idées progressistes.

Pour autant, la consolidation du foncier est un enjeu de taille pour des tiers lieux aux modèles économiques fragiles.

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